Assises de Gironde : « un terrorisme physique et psychologique »
Publié le :
03/05/2019
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Le procès de Bernard Boumedine se poursuit devant la cour d’assises de la Gironde. Verdict demain
L’intensité des débats est allée crescendo depuis lundi au procès de Bernard Boumedine, accusé de viol et de violences sur une partie de son entourage « sous influence ».
Ce matin, l’expert psychologue a relevé « le récit factuel » et l’accusé, qui veut à tout prix et trop convaincre de sa bonne foi, se montre moralisateur, se présente comme victime, enjolive la vérité, est dans le déni de ses conduites addictives à l’alcool et au sexe et « assouvit ses pulsions sans culpabilité ».
Il a parlé de « perversion morale » plus que de gourou. « Il attire une proie dans sa toile, l’isole, joue avec elle pour la rendre à sa merci sous prétexte de vouloir l’aider ou la sauver » et exercer « un terrorisme physique et psychologique. C’est un processus d’influence mentale ». Un travail psychique qui ne peut s effectuer que sur des gens vulnérables, « des personnes ouvertes à tout ce qui peut les faire aller mieux ou le croire ». Avec pour l’auteur une finalité de profit, « ici de nature sexuelle ».
Le plus grave, pour l’expert psychologue demeure l’anosognosie (un trouble neuropsychologique qui fait qu’un patient atteint d’une maladie ou d’un handicap ne semble pas avoir conscience de sa condition) de l’accusé, du « tsunami de pulsions sexuelles qui envahissent sa personnalité« . Bernard Boumedine n’a pas pour lui de double personnalité.
« Ces traits de personnalité existaient bien avant, mais étaient cadrés, mis en sommeil », ce qui expliquerait les témoignages plus mesurés de sa première famille. « Mais sa personnalité de base est ressortie dans un contexte d’alcoolisation, de sexualité imposée et violente ».
Service minimum pour l expert psychiatre en visioconférence depuis Paris. Il a cependant souligné « le travail de sape de l’alcoolisation chronique qui entraîne une déchéance ethico-sociale ».
Les avocats des parties civiles ont ensuite pris la parole. Me Pierre-Emmanuel Barois a rappelé « la pyramide d’infractions », _une dizaine_ en haut de laquelle se trouve l’accusé. Il est en effet jugé pour des viols, des agressions sexuelles, des violences habituelles, y compris sur la fille de sa compagne et celle de ses voisins. Me Barois est revenu sur quatre jours de débats éprouvants, a décrit des victimes « ravagées de tristesse et de détresse ». « Il décidait qui pouvait et devait faire quoi, télécommandait les autres ».
Il a insisté sur le calvaire de sa cliente Valérie, l’épouse de Bernard Boumedine. Et même si ce dernier a tendance à inverser les rôles, l’avocat ne veut pas faire de Valérie une coupable à l’origine des faits.
Me Daniel Picotin a quant à lui longtemps insisté sur le « hold-up des cerveaux » qu’a réussi l accusé. Ses clients, les voisins de Bernard Boumedine « ne sont pas masochistes ». Pourtant pendant des mois, ils ont non seulement accepté les remarques et insultes destinées à les culpabiliser et les rabaisser et les coups, mais sont revenus chaque soir voir l’accusé. Et l’avocat de décortiquer le mécanisme de l’emprise psychologique de « cet obsédé sexuel sadique et pervers qui tente de transformer l’autre en objet». Dans son box, Bernard Boumédine soupire, maugrée, secoue la tête.
Mais Me Daniel Picotin en connaît un rayon sur la mécanique des sectes. « Tout y est ! La fausse biographie quand il se prétend ancien agent de la DST. Le pouvoir divin, quand il se prétend un ange, qu’il s’engouffre dans les failles psychologiques de ses voisins, quand il utilise le geste de frapper côté cœur. Le savoir mystique, quand il invente des phrases obscures qui seront recopiées, encadrées et accrochées au mur du salon de ses vicitimes. La technique du conditionnement quand il impose une musique indienne en boucle, qu’il diabolise les personnes extérieures. C’est a minima un apprenti gourou, un sorcier qui bricole pas si mal puisqu’il a réussi avec les moyens du bord, en usant et abusant de son pouvoir de séduction, à lobotomiser ses voisins. Il faut rendre justice aux victimes ».
Avouant n’avoir « jamais été confronté aux faits qui nous réunissent aujourd’hui », l’expérimenté avocat général Jean-Paul Dupont est lui aussi revenu sur « le cadre particulier des faits qu’est l’emprise mentale. » Face à ces exemples de « chosification » d’autrui, de rejet de l’autre en faisant régner la peur et ce climat de violences habituelles verbales, psychologiques, sexuelles, physiques, il a requis 14 ans de réclusion criminelle et un suivi socio-judiciaire de dix ans. « Il y a tout lieu de craindre qu’il reste dangereux ».
Demain, Me Delphine Gali et Michelle Bauer plaideront pour l’accusé.
Source : Sud Ouest du 16/02/12
Historique
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