« La vente du château des reclus de Monflanquin attaquée «
Publié le :
03/11/2010
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La famille de Védrines a assigné en justice le notaire et les nouveaux propriétaires
Ses volets rouges avaient rouvert courant 2009. C’était le château des reclus de Monflanquin (47), pièce maîtresse du patrimoine de la famille de Védrines dilapidé dans l’ombre d’un présumé gourou, Thierry Tilly, aujourd’hui écroué. Vieille de 400 ans, la bâtisse s’était trouvée de nouveaux habitants depuis peu. La voilà rattrapée par son histoire : les Védrines tentent de faire annuler sa vente. Ils ont assigné devant le tribunal de grande instance d’Agen un notaire tarn-et-garonnais et les deux propriétaires qui leur ont succédé.
« J’attaque la vente du château pour vice du consentement », justifie Me Daniel Picotin. L’avocat bordelais d’une partie de la famille s’empresse de planter le décor : « Il a été vendu alors que plusieurs membres de la famille étaient contraints de subir une sous-alimentation et des privations de sommeil. » En janvier 2008, le château de Martel était cédé pour 460 000 euros.
« Sains d’esprit »
C’est Guillaume, 31 ans, qui représentait seul la famille devant le notaire, l’acquéreur étant un commerçant toulousain. Joint à sa boutique d’électronique par « Sud Ouest », celui-ci oppose sa bonne foi sous couvert d’anonymat : « On est passé par un notaire… Les choses se sont faites en règle. L’avocat m’a dit que c’était un dossier solide », se rassure-t-il. Cet été, il a été entendu 32 heures au commissariat. Approché par un courtier lot-et-garonnais, ce commerçant en quête d’« un investissement » avait bien rencontré « la tante, le fils et la grand-mère » au cours d’une visite des lieux. Il les avait trouvés « sains d’esprit » : « C’est la question qu’on m’a posée au commissariat. C’est là que j’ai su qu’ils n’étaient pas bien. »
Me Picotin veut croire que la situation notoire de la famille aurait pu inciter à une élémentaire prudence. Jean Marchand aussi, lui qui avait tenté d’empêcher la vente. « Pour ne pas la connaître ni en prendre la mesure, il fallait faire exprès. C’est une opération spéculative sans être regardant ni sur les moyens ni sur le contexte. J’espère que la justice arrivera à démontrer qu’il y avait collusion », dit le seul membre de la famille à avoir réchappé à Thierry Tilly.
Une lettre anonyme envoyée à l’étude du notaire se voulait dissuasive. « C’était écrit de ne pas faire la vente », convient l’investisseur toulousain. Il l’a fait savoir à Guillaume de Védrines : « Il m’a fait comprendre que c’était des bobards, des jalousies de famille. » Mais le château de Martel n’a-t-il pas été cédé à bon prix ? « Si j’ai fait une bonne affaire, ce n’est pas interdit par la loi. »
Car les Védrines en devenaient simples occupants, une convention stipulant que la famille… rachète les murs cinq ans plus tard, en 2013. Montant annoncé de la transaction : 850 000 euros, les cinq années d’occupation étant incluses. Il apparaît que la famille ne souhaitait pas abandonner le château mais obtenir un prêt sur gage. Me Patrick Lamarque, l’avocat agenais du commerçant toulousain, a sous la main les nombreux mails de relance que Guillaume de Védrines adressait au courtier, très pointus en la matière.
« Emprise mentale »
« Ils disaient qu’ils avaient besoin d’argent pour l’installation en Angleterre. J’ai demandé « Comment vous comptez rembourser ? » Le fils m’a répondu que son père, gynécologue à Bordeaux, devait reprendre son activité là-bas, que la gynécologie paye beaucoup plus en Angleterre qu’en France. Je me suis dit, c’est bon. » S’il a cru flairer la bonne affaire, l’investisseur eut beau contacter la famille à Oxford « par téléphone, par mail », il n’a plus eu ni nouvelles ni indemnités d’occupation. Document à l’appui, son avocat révèle le prix de revente du château : 530 000 euros. « Quand on déduit les frais, les travaux, il a perdu de l’argent ». « 10 000 à 15 000 euros », assure l’intéressé. Un « brocanteur vide-maison » a fini par faire place nette, débarrassant le château des effets personnels des de Védrines, habits et autres souvenirs de famille. Me Picotin se doute qu’il sera difficile d’obtenir gain de cause « dès lors que les acquéreurs ne sont pas ceux qui ont torturé ». Aussi l’avocat n’exclut pas de solliciter un délai, le temps que la procédure criminelle aboutisse en parallèle : « Il faut que je puisse prouver l’emprise mentale. »
Source : Sud Ouest du 3 novembre 2010
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